À l’heure où de plus en plus de voix s’interrogent sur le sort du journalisme togolais, il nous semble nécessaire de commencer à comprendre ce qui explique les dérives, de comprendre pourquoi les espoirs qu’un véritable espace public émerge s’évanouissent.
Ce n’est un secret pour personne, la presse privée voit le jour en se positionnant essentiellement comme pourfendeuse de l’État, et ne prend pas la peine de s’instituer, c’est-à-dire de poser les balises qui fonderaient son authenticité. Elle s’est contentée, dans son fonctionnement, de reprendre les excès de passion inhérents aux médias à la solde de l’État. Sans claire déontologie ni principes éthiques qui l’encadrent, sans orientation philosophique qui agrège son travail, le journalisme togolais de l’ère actuelle naît dans la dérive et bien largement, n’a cessé de s’y vautrer.
Certes la presse doit dénoncer les abus de l’État. Plus qu’un simple rôle, il s’agit d’une de ses responsabilités fondamentales. Mais une dénonciation sur la base des faits, bien documentée, fruit d’un travail d’investigation mené selon les règles et procédés journalistiques établis, est le moyen essentiel d’apporter sa contribution à la bonne gouvernance et au progrès social. Nous sommes bien conscients que le concept d’objectivité est particulièrement controversé. Mais faute de mieux pour rendre compte du professionnalisme dans le travail journalistique, il demeure le concept de référence, « la qualité première requise de l’ensemble des pratiques journalistiques ». Ce qui importe, c’est moins le concept en tant que tel que l’établissement de standards qui distinguent le journalisme de toute autre forme de communication publique. Standards qui, bien que basés sur des principes universellement reconnus, tels que l’indépendance journalistique, la neutralité ou l’honnêteté, doivent s’articuler aux exigences contextuelles, c’est-à-dire à une approche rédactionnelle dont l’ambition n’est pas la vérité, mais toute vérité qui serve un projet national. Une telle approche éviterait, par exemple, à la presse de se disperser inutilement, de se banaliser par un lourd penchant pour les faits divers, et lui permettrait ainsi de faire des choix rédactionnels pertinents.
Nos recommandations :
il faut beaucoup plus que de meilleures infrastructures, de meilleurs salaires ou une meilleure formation de journalistes pour redorer le blason du journalisme togolais. Il faut lui définir une nouvelle vocation, articuler une nouvelle doctrine à partir de laquelle repenser la politique de l’information.
Par Honorable. Innocent KAGBARA